vendredi 10 septembre 2010

Mardi 3 août

Arturo arrive, je lui offre un pan dulce, et m'attends à ce qu'on aille tout de suite à la Casa de los Pobres. Ah, oui, la Casa de los Pobres, se souvient-il. J'ai une mauvaise nouvelles, ils sont en vacances. Il n'aurait quand même pas l'intention de m'infliger un rendez-vous galant ? Quand je lui demande s'il n'existe pas une institution similaire dans le coin, il me parle de la Casa Padre Chavo, qui selon lui est fermée aujourd'hui. Je lui propose d'aller tout de même à la Casa de los Pobres, juste pour voir à quoi ça ressemble. Gêné, Arturo. On grimpe la colline jusque là-bas, et ils sont effectivement en « vacances » - il s'agit plutôt d'un nettoyage de fond en comble. Je rencontre une Mère et une Sœur qui travaillent ici. Discussion complètement impromptue, elles m'expliquent le fonctionnement de la Casa qui propose un repas par jour à tous ceux qui viennent le demander. La Casa offre aussi une assistance médicale et spirituelle, des cours de catéchisme, une aide sociale, juridique et administrative, des vêtements, des meubles, des bourses d'études pour les enfants de la primaire à la prépa. Puis, la Sœur me fait visiter les locaux. Tout est très bien organisé, lumineux, authentique, accueillant. Selon elle, l'avoine que servent les cuisinières est la meilleure du monde, et elle est célèbre à Tijuana. Ce que me confirme Arturo un peu plus tard.
C'est beau de voir qu'il y a des gens assez courageux pour dédier leur vie à aider ceux qui en ont besoin. La Sœur est d'une humilité déconcertante, d'une sobriété et d'une gaieté exemplaires. Lorsque je la félicite pour son travail, elle me dit que tout ceci n'est que l'œuvre de Dieu.
Je prends congé en me disant que j'adorerais être volontaire ici, et rejoins Arturo. Nous allons nous balader dans le centre de la ville. Il m'emmène dans un coin un peu craignos de Tijuana, lieu privilégié pour les touristes qui viennent chercher ici un peu de plaisir et de consolation, soit dans des night-clubs, soit auprès des filles et de leurs talons vertigineux en plastique transparent. Ce serait tellement génial de parler avec l'une d'entre-elles, mais je n'ai pas le cran d'engager la conversation. Les macs ne doivent pas être bien loin, et puis après tout, elles sont en train de travailler.
Je ne sais plus très bien ce que nous faisons ici, et à mesure que nous nous enfonçons dans le quartier rouge, Arturo commence à montrer un vif intérêt, à me dire qu'il aimerait bien avoir mon carnet de croquis en souvenir (ben voyons), puis il me regarde et me dit qu'il va me voler, qu'il va me garder pour ne pas que je parte. Cauchemar. Demi-tour. Je ris jaune, tâche de répondre avec un peu de détachement, mais ce genre de petites plaisanteries ne me fait vraiment pas rire. Il me raccompagne jusqu'à mon bus, et lorsque nous attendons de traverser, il me dit qu'il y a quelque chose qu'il aimerait savoir, tu sais ce que c'est ? Non, je réponds, catégoriquement, en regardant ailleurs. « Comment embrasse une Française. » Au secours, sortez-moi de là. Je lui réponds tant bien que mal que ce n'est pas vraiment le genre de relations qui m'intéresse. Ça commence à bien se faire, tous ces types qui se font des idées, ils m'épuisent.
Dans la soirée, j'ai une longue discussion avec Cathie. C'est un tel plaisir de parler avec elle, elle a tellement d'anecdotes hilarantes, comme le jour où ils étaient avec un groupe d'activistes pour aller visiter les locaux de la Border Patrol, et où Lynn n'a pas pu rentrer pour une raison encore inconnue. Alors, il les a nargués toute l'après midi; « a-ha, juste moi ! Juste moi ! », fier comme un bar-tabac. Ou encore cette manifestation à laquelle participait un groupe d'anarchistes, qui, conformément à leurs principes, refusaient de suivre le mouvement et zigzaguaient de droite à gauche.

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