samedi 21 août 2010

Samedi 10 juillet

Tijuana me plait beaucoup pour l'instant, et il n'y a pas l'ambiance glauque à laquelle je m'attendais. C'est coloré, bruyant, animé, joyeux.
On rentre manger les enchiladas de Doña Hilda. Deux jeunes sont arrivés. Je discute avec Angel – en anglais. C'est tellement plus facile, tout passe mieux, je le comprends, il me comprend, magique. Angel a grandi en Arizona, où il a toute sa vie. C'est en essayant de revenir du Mexique où il avait passé quelques temps qu'ils l'ont repéré : faux papiers. Angel a quatorze ans, il va rester un moment à Tijuana, chez ses oncles. Il a l'air heureux, bien qu'un peu nostalgique – il sourit, avec ses petits yeux en demie-lune, rigole, bavarde, plaisante. Un chouette petit gars. Sa tante vient le chercher, et ils ont l'air très sincèrement heureux de se revoir.
Je me fais un peu de souci pour mon projet. La plupart des jeunes qui arrivent ici ne restent que quelques heures avant qu'un membre de leur famille ne vienne les chercher. Et j'ai beaucoup de mal à discuter avec eux. C'est pourquoi je n'ai encore réalisé aucun portrait. Il y a dans cette idée une façon de prendre les gens pour objets qui me gêne énormément. On verra.
A part ça, je crois qu'il faut dire un petit mot sur Doña Hilda. Doña Hilda est toute petite avec des cheveux en brosse décolorés sur le dessus, et des yeux fatigués. Elle marche tout doucement, en trainant ses tongs en plastique et sa polaire rose bonbon Winnie l'ourson entre la cuisinière et le frigo géant. Doña Hilda réchauffe les frijoles, retourne les tortillas plus vite que son ombre, se lèche les doigts, remue la sauce tomate, tousse, s'essuie les mains dans son tablier à carreaux, prépare les enchiladas en se suçant les doigts pleins de chile, grignote les miettes qui trainent, et te tend ton assiette avec un sourire édenté. Mais alors ses enchiladas, hmmm, c'est les meilleures du monde, juré.

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