mardi 17 août 2010

Mardi 6 juillet 2010

A partir d'aujourd'hui, un extrait quotidien du journal de route que j'ai tenu tout ce mois pour Zellidja.


Seize heures quarante heure locale, aéroport de Los Angeles, conglomérat de bunkers en labyrinthe incompréhensible. Je me prépare à une grosse galère pour l'entrée sur le territoire, je me souviens de l'interrogatoire vicieux et morose auquel j'avais eu droit il y a deux ans pour un bête échange de correspondants à Chicago, alors là, seule, mineure, pas d'adresse aux USA et avec un projet pas tout à fait innocent... Et puis, ça passe nickel – je crois que l'officier est d'origine Mexicaine, et il a l'air enthousiasmé par ce que je vais faire à la frontière.

L'aéroport est plein d'agents plus ou moins officiels qui vous sautent à la gorge pour vous aider si vous avez le malheur de lever le nez pour chercher votre vol...

La Californienne qui attend juste à-côté de moi est littéralement greffée à son téléphone, détaillant l'intégralité de sa vie sociale à ses interlocuteurs et à ceux alentour par la même occasion.

Nouveaux aperçus de la société étasunienne. The more you buy, the more you get ! Sign me in, now ! Safety, security, federal law à toutes les sauces, les outils parfaits pour mener à la baguette des millions de consommateurs et d'électeurs, guidés par la peur et l'envie. Comment peut-on vivre dans un tel système, ou l'architecture et l'urbanisme en deviennent humiliants à force de rivaliser en immensité et en complexité, et où à la fois tous les instincts les plus bas de l'individu sont flattés, instrumentalisés, rentabilisés ? Comme ma voisine de siège qui dévore un magazine de mode et ressemble comme deux gouttes d'eau à toutes les pin-ups qui y figurent, comme ces échangeurs autoroutiers dont je peux à peine distinguer les voitures, comme ce nuage de smog violacé qui nappe le ciel grisâtre de Los Angeles, comme tous ces gens qui ont l'air malade, qui trainent leur graisse, verre Starbucks à la main et Ipod vissé aux oreilles, en famille s'il-vous-plait, l'oeil vitreux et en tee-shirt US... Patriotisme, à boire, l'estomac plein et les artères bouchées, du soleil, du béton, de la poussière et des palmiers, que demande le peuple ?

On survole l'océan. Du bleu, du vrai, ouf. Avec une grande réflexion de soleil qui dilate l'horizon. C'est la première fois que je vois le Pacifique.

Vingt heures trente, heure locale, me voilà à Tijuana ! Uriel s'est tapé les deux heures d'attente à la frontière pour venir me chercher à l'aéroport – un bonhomme adorable, avec des lunettes comme des hublots, tout rond et souriant. L'espagnol passe tout seul, il m'emmène, on traverse la frontière en moins de deux. C'est fou. A droite, les tourniquets à sens unique, por supuesto, par lesquels passent les Mexicains qui rentrent de leur journée de travail aux USA, en grappes avec casquettes et gros sacs. A gauche, dans l'autre sens, c'est une ligne interminable de voitures, car la procédure n'est pas la même, évidemment.

Tijuana. C'est incroyable d'être ici. Je suis à Tijuana, bordel ! Tijuana !!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire